Wednesday, April 18, 2007

UNSUNG, ou pas assez sung à mon goût

On a acheté quelques bibliothèques supplémentaires, récemment, histoire de récupérer un peu de l'espace vital grugé par l'océan exponentiel de livres qu'il y a dans notre nano-3 1/2. Ça m'a donné l'occasion de raviver (au son d'un ponctuel soupir attendri) le souvenir de quelques trésors qui s'y trouvent.

Je n'aurai pas la prétention d'en faire des critiques, mais voici tout de même quelques un de ces livres qui me sont très chers, que je vous recommande et qui sont passés dans le beurre, souvent parce qu'ils ne sont pas considérés comme de la bande dessinée (ce qui est très dommage, franchement...). J'ai une tendinite au poignet gauche (heureusement : je suis droitier) alors je serai peut-être moins bavard que d'habitude (yééééé).


Chagrin : mode d'emploi, Rémi Malingrëy (Verticales)
Un livre vers lequel je retourne régulièrement (à peu près autant que le Livret de Phamille de Menu). Assez fondateur dans mon envie de faire de la bande dessinée en tant qu'adulte. Complètement ignoré par le monde de la bande dessinée (et c'est tant pis pour celui-çi).


Par avion, Jean-Jacques Sempé (Denoël)
L'existence de ce livre me complexe à un tel point qu'il rend difficile la finalistaion de Projet domiciliaire.


L'ascension sociale de Monsieur Lambert, Jean-Jacques Sempé (Denoël)
Un autre modèle. Je viens de me rendre compte qu'il s'agit d'un sequel, j'ai hâte de lire le premier.


La valise, Nadia Raviscioni (Atrabile)
Un livre assez spécial, hanté.


Blanche Épiphanie, Jacques Lob & Georges Pichard (Serg)
J'embarque pas mal moins dans le reste de la série, mais le tome 1, en noir et blanc, souple dans l'édition Serg, c'est un sommet.


Caroline Choléra, Danie Dubos & Georges Pichard (Albin Michel)
Danie Dubos était l'épouse De Jean-Claude Forest, et on trouve une parenté de ton dans leurs écritures respectives. Un livre-lieu avec une écriture racée, comme je les aime. J'aimerais bien le rééditer un jour, à la manière MG. Râh, la peste soit du manque de temps...


Lolly Strip, Danie Dubos & Georges Pichard (Losfeld)
Assez ancré dans son époque (pour le meilleur, ce qui n'est pas souvent le cas). Très libre et envoutant. Le dessin de Pichard y est à son meilleur, avant les petits points et les éléments de torture (qu'on retrouve, assez paradoxalement, sur la couverture).


L'immense solitude ( avec Friedrich Nietzsche et Cesare Pavese, orphelins sous le ciel de Turin), Frédéric Pajak (P.U.F.)
Un autre coup dur pour mon ego.


Tantrum, Jules Feiffer (Knopf/Fantagraphics)
Ça, on va le rééditer en français sous peu, alors vous verrez bien pourquoi c'est un de mes livres préférés.


Le journal de Jules Renard lu par Fred, Fred (Flammarion)
Un autre de ces joyaux de la profession partiellement englouti dans l'oubli.


J'ai tout mon temps, François Matton (P.O.L.)
Je me sens assez complice de sa démarche. Je pense comprendre là où il veut en venir. En tout cas, j'apprécie beaucoup.


Les heures de verre, Alice Lorenzi (La cinquième couche)
Une des auteures les plus importantes ces temps-ci. Un GROS GROS coup de coeur récent. Ses comix chez Mycose sont aussi essentiels.


Histoire de l'art, Paul Cox (Seuil)
Très cher pour le temps de lecture, mais on le relit 25 fois, alors c'est pas si mal.


Mon amour, Paul Cox (Seuil)
J'aime beaucoup Paul Cox.

Il ne vous reste plus qu'à voler une sacoche de madame et à courir chez votre libraire compétent préféré !

J

Wednesday, April 04, 2007

du moisi


Drôle de semaine. Il fait un temps morbide. Le grand-père de ma blonde, un homme très digne et attachant, est mort dimanche matin. Ma dentiste m'a appris qu'une grande part de l'argent que je vais faire dans les prochaines années va servir à réparer ma mâchoire, démolie par le stress et/ou les dents de sagesse qui ont poussé n'importe comment. En plus, je pogne le cap du 33 ans (un vendredi saint ??!!??). Et j'ai un gros, gros coup de fatigue. Mais comme je suis un workaholic irrécupérable, je me suis trouvé de quoi à faire malgré mon énergie à plat et mes capacités de concentration limitées : du rattrapage dans la numérisation de mes carnets pour le nouveau site MG. Comme cadeau de fête, je me suis offert de sauver de l'oubli une part de mon travail qui m'est assez chère.

Ça a été toute une expérience de replonger là-dedans, revivre ces années là, croiser les filles avec qui ça a foiré et celle avec qui ça a marché. Je feelais pas ben ben dans ce temps-là (1998-2001). Il y a des carnets qui ont souffert (l'un d'eux a été pitché au bout de mes bras par la fenêtre). Il y avait quelques beaux souvenirs aussi, quand même. C'était intéressant (et bizarre) de faire le point sur les promesses tenues ou trahies de 1998-1999. Les carnets sont souvent vus comme des gammes de musicien, de la gymnastique, de la cuisine interne, mais ça a toujours été pour moi une pratique riche, complète et autonome.

Sur le site, j'ai aussi mis (mais un peu caché) Le charme légendaire des lunatiques timides, un faux-livre, qui regroupe mes premières tentatives de bande dessinée (sauf celles qu'il y a dans Quelques pelures, qui sont des cas flagrants de beginner's luck). La différence de qualité est étonnante entre le dessin dans mes carnets et celui de mes tentatives de bande dessinées de la même époque. On voit que je souffrais en titi de la technique classique du crayonné/encré, et du besoin de contrôle du dessin inhérent à la bande dessinée. Paradoxe fondamental du medium, puisque ce qui fait pour moi un bon dessin est en premier lieu la justesse de l'émotion rendue, le "jeu d'acteur" des personnages dessinés. C'est une poésie instinctive, fragile, têtue, imparablement honnête, qui boude et qui résiste quand on essaie de trop la pousser. Et par essence, l'encrage n'est qu'une stérile redite. Fixant dans une rigidité fade les beaux accidents du premier jet. Ça m'enrageait énormément, dans le temps, cette impression d'épingler un papillon au mur dans le but d'obtenir un trait net de bon élève. Devenir auteur de bande dessinée, c'est d'abord et avant tout apprendre à dompter ce paradoxe. Conjuguer sensibilité et clarté.

Donc, péchés de jeunesse et carnets de dessin. On accuse l'acte de dévoiler ces choses du même délit que la bande dessinée autobiographique : crime de vanité. Soit, mais la critique n'est-elle pas une manifestation encore plus vive de la vanité ? Raisonnement creux. Au moins, sur internet comme ça, ça n'a même pas la prétention de valoir une cenne.

J